« Oui, assurément, c’est une évidence » répondrait n’importe quelle personne sensée. Mieux, un public averti argumenterait que :
– L’optimisme affiché par le manager crée de la confiance dans l’avenir et donne l’envie d’aller de l’avant à l’équipe
– L’optimisme rend serein, crée un bien-être mental et met à distance les risques de dépression. La science le démontre.
A ce compte, un manager pessimiste serait proche de la faute professionnelle.
Toutefois, un optimisme contraint ou de façade a-t-il toutes les chances de produire les vertus énoncées ? Le pessimisme serait-il obligatoirement sanctionnable et cause de démotivation ou potentiellement perçu comme de la rigueur, si le résultat d’une analyse l’impose ?
Alors finalement, un manager doit-il être forcément optimiste ?
Oui et non, tout dépend de ce qu’on en fait. Un éclairage nous est fourni dans l’indispensable livre « une autre fin du monde est possible » *. Les auteurs distinguent l’optimisme de caractère, lucide, capable d’affronter la réalité des faits, de les énoncer et de se mettre en action avec un esprit positif, de l’optimiste aveugle qui répond à l’injonction « moi, je suis optimiste. Je vois toujours le verre à moitié plein ». C’est pour lui autant un sujet de fierté qu’une posture non négociable. Posture qui peut le pousser à rejeter quiconque viendrait lui exposer des réalités et des faits susceptibles de contrarier son obligatoire optimisme obligatoire. Les auteurs nomment le premier « l’optimiste-plus » et le second « l’optimiste-moins ». De même, dans le « camp » des pessimistes, nous trouverons les « pessimistes-plus », toujours en lien avec les mauvaises nouvelles, mais pour ne négliger aucun fait et pour sans cesse s’y préparer, et les « pessimistes-moins » qui abondent de commentaires pour décourager la moindre action à coup de « à quoi bon ? puisque tout est foutu ».
Le but n’est pas de départager les « optimistes-plus » des « pessimistes-plus » et d’argumenter sur les avantages supérieurs de l’un par rapport à l’autre. Dans ce même ouvrage, on peut lire « l’optimisme et le pessimisme semble propres à chaque personnalité. La seule mise en garde que nous aurions est de ne jamais en faire une excuse pour s’installer dans le déni, la lâcheté ou l’ignorance ».
Et si, plutôt que l’optimisme est la seule posture socialement acceptable dans les entreprises, on encourageait les managers à faire preuve de réalisme, transparence…et courage ?
A vouloir être trop optimisme, on se rend aveugle aux vérités qui dérangent et en grande fragilité lorsque les faits viennent contrarier le quotidien fantasmé. « Optimistes-plus » et « pessimistes-plus » se rejoindre sur point essentiel : en toutes circonstances, affronter les faits pour agir. Plus que tout, et plus que jamais sans doute, ce qui compte, c’est l’action en toutes connaissances de cause. Et s’il y a des sujets qui illustrent particulièrement ce point, c’est la crise climatique. Dans trop d’entreprise, à force de taire tout début de discussion sur le sujet pour cause de pessimisme déprimant, on flirte avec le déni. Sans doute pas le meilleur moyen de lutter contre la « grande démission ».
Soyons optimistes, les managers veulent le support de leur entreprise pour parler vrai, même lorsque cela fait mal, pour agir.
Et si on se lançait ?
• Une autre fin du monde est possible, P. Servigne, R. Stevens, G. Chapelle ; Seuil